sábado, 13 de agosto de 2011

Apprendre et comprendre

Voici des hommes qui enseignent. Ils ne cherchent pas à deviner à quelles pensées, à quels sentiments peuvent correspondre, dans l'esprit de leurs disciples, les mots et les formules dont ils se servent; non, ils s'écoutent, ils ne parlent que pour eux-mêmes. Un tel "enseignement" ne peut être qu'un soliloque de l'éducateur, accompagné tout au plus d'un enregistrement automatique de la part du disciple.

L'enseignement vrai doit être pourtant un dialogue, et la première condition d'un dialogue, c'est de parler à l'autre et pour l'autre. Loin d'être une table rase à la manière d'un disque phonographique, l'espreit du disciple possède déjà un capital innombrable de sensations et d'idées, et la nouvelle richesse que lui apporte l'educateur n'aura de valeur pour lui que si elle vient s'ajouter à ce capital préexistant. Enseigner, c'est continuer: le maître ne peut pas faire de don efficace s'il ne tient pas compte de ce que le disciple posséde déjà; son oeuvre se borne alors à égarer l'esprit de celui-ci sur une multitude de routes dont aucune n'aboutit à rien, parce que, au lieu de s'ajouter l'une à l'autre, elles partent toutes de zéro.

Le problème de l'enseignement se raméne ainsi au problème de l'adaptation d'un savoir nouveau à un savoir antérieur: d'où, parallèlement au soin d'amasser pierre sur pierre, la nécessite constante de vérifier les fondements et de veiller sur les matériaux de liaison. Dans la construction éducative, c'est toujours le ciment qui manque le plus! Les pierres peuvent être belles et nombreuses, l'édifice n'en reste pas moins privé d'unité et terriblement fragile: c'est l'instruction sans la culture (j'appelle culture ce souffle impondérable de sagesse vivante qui relie et organise les données de l'instruction comme fait l'âme au corps). Édouard Herriot a, je crois, défini la culture comme "ce qui reste après qu'on a tout oublié", mais on pourrait l'appeler tout aussi bien "ce qui manque après qu'on a tout appris".

Fonte: "Retour au réel" - H. Lardanchet, 1943

sábado, 6 de agosto de 2011

Inconscience

Il semble que les poisons du diable aient décomposé non plus seulement la volonté, mais la substance des hommes... Quelle déconcertante naïveté, quel "bon-garçonisme" subsistaient dans les plus corrompus! Je songe à cet épisode extraordinaire tiré d'un évangile apocryphe: Jésus rencontrant un homme qui travaillait le jour du sabbat lui dit: "Si tu sais ce que tu fais, tu es sauvé, mais si tu ne le sais pas, tu es condamné." Tant que l'homme sait qu'il pèche et s'ágare, quelque chose en lui reste accessible á la verité: Dieu peut encore le saisir. Aujourd'hui, l'homme échappe de plus en plus au conflit intérieur, au déchirement, au remords. L'inconscience lui tient lieu de bonne conscience. Et, quoiqu'en dise saint Augustin. Celui qui nous a créés sans nous devra aussi nous sauver sans nous... (C.V. - 28.10.35)

Fonte: "Parodies et mirages ou la décadence d'un monde chrétien"
Éditions du Rocher, 2011